Nécropole de Morette : on n’instrumentalise pas les morts des Glières
Paru dans le Dauphiné Libére le 29/09/2021 par Stéphane BOUCHET
Le préfet de la Haute-Savoie vient de prendre un arrêté réglementant la Nécropole nationale des Glières, notamment pour y manifester ou s’y regrouper.
Le 4 octobre 2020, une cinquantaine d’indépendantistes savoisiens choisissaient la nécropole de Morette pour se rassembler et revendiquer la restauration de l’État de Savoie. Un choix étrange que celui d’un cimetière, abritant les tombes de 105 résistants et soldats victimes du nazisme et de la milice, tombés en défendant la France… Une « récupération » aussitôt dénoncée par l’Association des Glières, les associations d’anciens combattants et même le fondateur de la Ligue savoisienne.
À peine retombées, les protestations reprenaient de plus belle le 31 octobre. Cette fois, des manifestants contre les mesures sanitaires, dispersés dans le centre de Thônes, décidaient de se diriger vers la nécropole, la gendarmerie étant contrainte de s’opposer physiquement à leur incursion.
La goutte de trop. Un an après les faits, le préfet de la Haute-Savoie vient donc de prendre un arrêté réglementant la Nécropole nationale des Glières pour dissuader toute nouvelle tentative d’occupation. Des mesures qui auraient pu être prises par un maire… si la nécropole n’était pas située pile à cheval sur la frontière entre La Balme-de-Thuy et Thônes. Le préfet étant le seul compétent pour prendre des « décisions relatives à l’ordre, à la sûreté, à la sécurité et à la salubrité publique dont le champ d’application excède le territoire d’une commune », il ne s’en est pas privé.
Ainsi est-il désormais formellement interdit d’y pénétrer en état d’ébriété, d’y cueillir des fleurs, ou de s’y « rassembler, de manifester ou d’organiser tout regroupement autre qu’ayant un but touristique, mémoriel ou pédagogique. » Il est de même interdit d’occuper les lieux, d’utiliser « un appareil sonore et amplificateur », sauf autorisation écrite sollicitée et obtenue de l’État. De même pour les prises de vues à usage professionnel.
Pas sûr que l’amende de 38€ soit réellement dissuasive, mais le texte donne au moins à l’État une légitimité pour faire respecter la sérénité des lieux.
Si le calme revient autour des 105 tombes, le texte ne mettra en tout cas pas fin aux débats.
Bien au-dessus de la vallée, le plateau des Glières restera à coup sûr un terrain d’affrontement entre les défenseurs de la mémoire des combattants et les “héritiers” du Conseil national de la Résistance, pour savoir qui, des uns ou des autres, défend le mieux l’esprit des Glières et les valeurs de la Résistance. Des valeurs revendiquées jusque dans les cortèges des anti-pass sanitaire chaque samedi…